Quand Djamina, la cofondatrice d'Hisseo a fait venir son premier container d'épices d'Inde, elle se rappelle avoir repris deux fois la calculatrice pour vérifier le coût du transport.
Elle avait bien en tête que le secteur du transport maritime était ultra-optimisé, mais elle avait aussi en tête le nombre de milles nautiques à parcourir.
Cela revenait à 25 centimes du kg pour faire venir ces épices de l’autre bout du monde.
Ces 25 centimes lui sont d’abord apparus dissonants.
Puis ils sont devenus la norme.
Elle a même pris l’habitude de les négocier, de chercher toujours moins cher.
Pour bien comprendre le poids du transport dans le coût d’un produit, prenons l’exemple d’un jean basique homme avec du tissu asiatique et analysons les données fournies par https://fr.fashionnetwork.com/.
Voici la répartition des coûts pour une confection au Portugal :
Le transport représente donc 2,5% du coût de revient d’un jean fabriqué au Portugal.
Voyons maintenant la répartition des coûts quand le jean est fabriqué en Chine :
Ici le transport représente 5% du coût de revient du jean, soit deux fois plus en valeur relative.
Logique, car on l’importe de beaucoup plus loin.
Pas si simple…
En réalité, si le transport prend plus de place dans le coût de revient en Asie qu’au Portugal, c’est que le coût de la main d’œuvre est plus de deux fois moins élevé en Chine.
Si on regarde en valeur absolue, le surcoût de faire venir un jean de Chine vs du Portugal est de 0,1€.
0,1€ pour 10 000km supplémentaire !
Un taux de fret fluctuant mais globalement très bas
Pour le comprendre, il faut introduire la notion de taux de fret.
Le prix du transport est dicté par un taux de fret qui varie en fonction des capacités des armateurs (fortes en ce moment) et du contexte géopolitique (attaques en mer Rouge, Covid, etc.)
90% des marchandises dans le monde transitent par la mer avec 3 flux principaux :
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- Asie – Europe
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- Asie – US
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- Europe – US
Ci-dessous le taux de fret sur ces principales routes en avril 2024.
En ce moment par exemple, le prix du conteneur Asie – Europe de 20 pieds est à 3 000$.
Un peu de maths :
Sachant qu’un conteneur peut contenir 10 palettes de jeans de 800kg/palette
Sachant qu’un jean pèse 1kg
⇒ le prix du transport du jean est d’environ 0,4€
CQFD.
Pourquoi le fret maritime est-il si peu cher ?
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- La taille des navires.
Le plus gros porte-conteneur du monde, le MSC Tessa peut transporter 24 116 conteneurs de 20 pieds soit potentiellement 600 000 tonnes de marchandises.
Les charges rapportées à la tonne de marchandises sont donc très faibles.
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- Les externalités écologiques ne sont pas prises en compte dans le taux de fret :
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- Émissions de CO2 – le fret maritime, c’est l’équivalent des émissions de l’Allemagne. Et pourtant, les armateurs ne paient pas encore la tonne de carbone émise, sauf en Europe depuis le début d’année.
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- Émissions de particules fines, d’oxyde d’azote et d’oxyde souffre ⇒ 60 000 morts prématurés par an et un coût de 58 milliards d’euros pour les services de santé
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- Atteinte à la biodiversité : collisions, dégazage, marée noire et perturbation sonores des mammifères marins.
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- Les externalités écologiques ne sont pas prises en compte dans le taux de fret :
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- Les armateurs profitent du système de pavillon de complaisance.
⅔ des navires sont sous pavillon de complaisance, ie « pour lequel la propriété réelle et le contrôle se situent dans un pays autre que celui du pavillon (c’est à dire de l’État) sous lequel il est immatriculé.
4 paradis fiscaux : Libéria, Malte, Ile Marshall et Bahamas représentent plus de 50 % du tonnage mondial. Et 4 marins sur 5 sont issus des pays pauvres.
Chez Hisseo, nous développons une alternative au modèle actuel avec notre projet de transport à la voile en Méditerranée.
Mais cette alternative est-elle crédible économiquement pour les chargeurs ?
Sans surprise, le transport à la voile est plus cher que le transport avec des énergies fossiles.
Pourquoi le transport à la voile est plus cher ?
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- La taille du navire. Les voiliers-cargos transportent entre 100 et 1000 tonnes de marchandises soit 600 fois moins que les plus gros porte-conteneurs. Les charges pèsent donc beaucoup plus, ramenées à la tonne de marchandises transportée.
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- Les armateurs véliques font aussi le choix d’une rémunération juste pour leurs marins. Transition écologique ET sociale. Nous nous immatriculons ainsi au pavillon RIF qui permet des conditions salariales et de travail du droit français.
Dans quelle proportion ?
Tout dépend des routes mais on peut considérer qu’en moyenne le transport à la voile est de 2 à 5 fois plus cher que le transport aux énergies fossiles.
Enorme ? Cela dépend de l’angle d’analyse.
Si on le regarde en valeur absolue, cela représente généralement quelques centimes en plus dans le prix de vente final d’un produit.
Il s’agit d’un surcoût absorbable pour des produits à forte valeur ajoutée, soit en augmentant légèrement leurs prix et/ou diminuant un peu leurs marges.
D’autant qu’il existe de nombreux avantages à opter pour un transport propre, à la voile.
Pourquoi certains chargeurs choisissent le transport à la voile, malgré le surcoût ?
Les chargeurs (les sociétés qui importent et exportent) qui embarquent avec des acteurs du transport à la voile compensent le surcoût avec les bénéfices suivants :
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- Amélioration de leur RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise) : sur les aspects de décarbonation, mais aussi de pollution de l’air, de biodiversité, de droits des marins..
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- Élément différenciant pour leur produit. Les chargeurs valorisent le transport à la voile et la cohérence de leur chaîne de valeur. Le meilleur exemple, c’est Grain de Sail qui a réussi à se faire sa place dans le marché ultraconcurrentiel du chocolat avec cet argument majeur (et un bon chocolat ;))
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- Attractivité de leur image. En liant leur marque avec l’univers de la voile qui véhicule des valeurs de nature, d’évasion et de défi.
Ci-dessous l’exemple d’Arcadie (Epices Cook), partie prenant du projet de Windcoop.
